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Catégorie : Culture
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Fille du célèbre
Roseliane, de son vrai nom Vavy, est la fille aînée du célèbre roi du Salegy, Jaojoby Eusèbe, l'artiste qu'on ne présente plus à Madagascar.
Roseliane, de son vrai nom Vavy, est la fille aînée du célèbre roi du Salegy, Jaojoby Eusèbe, l'artiste qu'on ne présente plus à Madagascar.
Jaojaoby, le roi du Salegy, Vavy Roseliane Jaojoby affirme depuis des années son identité forte en poursuivant une belle carrière indépendante. Rencontre

LTdS : Depuis que vous avez décidé d’embrasser une carrière en solo, combien d’album avez vous maintenant à votre actif ?
Roseliane :
En 2009, j’ai sorti mon premier album, riche de huit titres et intitulé « Gasikara ». Bientôt, un autre album suivra, mais quelques opus sont déjà disponibles, dont mon dernier titre « I’m built like that »

LTdS : Pourquoi un titre et un refrain en anglais, pour un salegy bien Malagasy ?
Roseliane :
D’abord, le salegy n’est pas voué à être chanté en une seule langue et ensuite, cette ouverture me permet de toucher un public plus large que la communauté malgachophone.

LTdS : Vous avez été absente de la scène Malagasy depuis un certain temps, pourquoi cela ?
Roseliane :
En fait je ne réside pas dans la grande île depuis quelques années. J’habite en France, ce qui ne m’empêche nullement de me produire sur scène en hexagone ou ailleurs, mais surtout de renouer avec mon public malgache, à la première occasion. Justement, j’animerai un cabaret au Jao’s Pub, à Antananarivo, le 5 septembre prochain. Pour cette semaine, je suis à Diego Suarez pour me ressourcer et rendre visite à ma mère, famille et amis …

LTdS : Il est souvent dit en coulisse et parfois même ouvertement que vous êtes une provocatrice, et que vous chamboulez l’ordre établi, par votre musique, textes, prestation scénique et productions vidéo.
Roseliane :
Provocatrice ! je ne crois pas, par contre, je suis une artiste engagée qui dénonce l’hypocrisie sociale, l’intolérance et la fausse pudeur. En effet, souvent, les gens ont cette tendance de juger et condamner sans se donner la peine d’analyser, d’essayer de comprendre … Les codes vestimentaires et les mots utilisés sont tellement critiqués par un certain nombre de personnes que ces dernières dans leur hâte de condamner perdent le sens du message. Ce qui est inadmissible pour moi c’est que nous, Malgaches, sommes intolérants vis-à-vis de nos propres compatriotes alors que nous laissons passer, voire même imitons sans réserve les productions étrangères d’une certaine tendance, disons plus « osée ».

LTdS : Un cas concret ?
Roseliane :
Prenons par exemple le cas du mot malgache « Vody » ou fesses, qui a pris tellement de sens péjoratif et désacralisé par une opinion sociale proche du puritanisme à outrance, alors que : « Vodiboky » (archive de l’état civil) renferme la mémoire administrative de l’état civil « Vodiondry » (Postérieur du mouton) symbolise le respect suprême que l’on offre aux parents de la mariée, lors d’une demande en mariage. « Vodiakoho » (postérieur du poulet) est le morceau de choix démontrant tout le respect que l’on doit aux aînés (…) La liste est longue ! ces quelques exemples démontrent la vraie place de ce mot dans la culture Malagasy. Pourquoi alors, dès lors que le mot « Vody » apparaît dans une conversation ou dans un texte, c’est perçu comme de l’obscénité, de l’obsession et de vulgarité pure et simple qui fait de son énonciateur un paria pointé du doigt ? Personnellement, j’aime bien appeler les choses par leurs noms, et surtout, je n’ai pas inventé ce mot… Je l’utilise juste, comme plusieurs autres mots de notre chère langue maternelle, quand il le faut, sans tourner autour du pot, à essayer de noyer le poisson.

LTdS : Parlez nous de votre dernière tournée à l’international.
Roseliane :
En fait, il ne s’agit pas de « Ma tournée », c’est plutôt l’une de celles où comme au bon vieux temps, j’accompagne mon père Jaojoby en tant que choriste et danseuse. Nous avons eu onze dates à l’international, entre la période du 25 juin au 5 août et nous sommes allés aux Etats –Unis et au Canada (Chicago, New -York, San Francisco, Madison, Montréal et Toronto). Il y avait aussi cinq ateliers animés par mon père Jaojoby, Razzia-Saïd (un de nos musiciens) et moi-même, pour faire découvrir aux Américains et Canadiens la musique et danse traditionnelle malgache. Ce fut un échange enrichissant, qui n’attend qu’à trouver une suite.

LTdS : Comment se passe l’enregistrement et la production de vos chansons ?
Roseliane :
A Madagascar, je n’ai pas de problème de musiciens ni de studio. Ma famille et mes amis sont là pour m’aider à réaliser les performances et enregistrements nécessaires. En France par contre, c’est un peu plus compliqué. Néanmoins, je travaille en permanence avec un ami guitariste qui s’appelle Lalandy. Les percussionnistes ne sont pas difficiles à trouver. Quant aux préparations de cabarets et spectacles, j’envoie mes morceaux aux musiciens via internet et chacun travaille sa partition en solo, chez lui jusqu’au jour de la répétition générale. Et ça marche bien jusqu’à présent.

LTdS : Vos deniers mots pour nos lecteurs ?
Roseliane :
Je voudrais juste préciser que nous n’avons pas à avoir honte de s’affirmer en tant que Malagasy , d’être nous-mêmes et d’être honnêtes. Le respect des valeurs ancestrales des Malagasy comme le « fihavanana » et la tolérance, le respect des « Fomba  » (traditions) sont tout à fait compatibles à l’ouverture au monde. Pourquoi vouloir changer ce qu’il y a de bien en nous si c’est pour les remplacer par des valeurs purement factices qui nous font renier ce qui nous sommes et qui nous éloigne de notre identité culturelle, seule chose qui fait que nous sommes ce que nous sommes ? Osons embrasser le changement tout en gardant le meilleur de nous même.

■ Propos reccueillis par Luis.K