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Carte de voeux « Une pensée de Diego Suarez »
Carte de voeux « Une pensée de Diego Suarez »

Nous avons décidé d’interrompre, dans ce numéro qui paraît à l’aube de 2017, l’histoire des heurs et malheurs de notre bonne ville autrefois nommée Antsirane, puis Diego-Suarez et enfin Antsiranana. D’autant plus que les années dont nous contions la chronique n’étaient pas très gaies : la guerre, la grippe espagnole puis la peste… Rien qui incite beaucoup à l’optimisme et qui soit en accord avec les légitimes vœux de bonheur de tout un chacun au seuil d’une nouvelle année. Nous faisons donc une pause provisoire dans le récit des évènements d’autrefois pour aller voir de plus près ce que l’on souhaitait aux Antsiranais du début du XXe siècle.

Les vœux de la Gazette du Nord

La Gazette du Nord parut à Diego de 1924 à 1936. De toute évidence, son rédacteur en chef de la Gazette du Nord n’était pas un joyeux luron. Qu’on en juge…
« Jeudi 25 décembre 1924
Bonne Année
J’ai toujours pris en grippe les fêtes de Noël et surtout du premier de l’an, si tant est que l’on puisse qualifier de fêtes ces fastidieuses journées consacrées aux échanges de visites, de souhaits plus ou moins sincères, directs ou par correspondance.
Ce qui me fait le plus enrager, c’est que quelqu’indépendant que l’on soit, il est presqu’impossible de s’en dispenser.
Vous n’avez pas même la ressource de fuir, de vous isoler : on vous répondra que la poste et le télégraphe sont à votre disposition, même dans le plus petit trou.
Il faut donc m’astreindre à ces coutumes vieilles comme le monde, et comme un chacun quiconque, ne pas ménager mes tirades de bonheur, de santé, de prospérité, de réussite, et surtout mes cadeaux, et m’abîmer dans des embrassades, des accolades, à vous dégoûter du baiser.
Malgré moi, à chaque nouvelle année, je suis obsédé par cette réminiscence de Bruant que je marmotte inconsciemment mais avec conviction quand je m’y arrête :
C’en est des fricassées de museau
Du p’tit môme à la trisaïeule
Les générations s’lèchent la gueule
En d’dans ça s’dit : crève donc chameau ;
Et, avec le chansonnier de Montmartre, je ne puis m’empêcher de conclure comme lui :
Moi ça m’emm…le jour de l’an.»

On le voit, l’éditorialiste de la Gazette du Nord ne mâchait pas ses mots !
Il se livre cependant, à son corps défendant, à la coutume des vœux et voici ceux qu’il adresse à la population de Diego-Suarez :

Les vœux de la Gazette du Nord en 1924

«Néanmoins, n’est-ce pas, et malgré ces boutades de vieux grincheux, je passerais près de vous pour le dernier des mufles si je ne venais en quelques lignes, au nom de la Gazette du Nord et au mien vous la souhaiter bonne et heureuse - santé et succès à tous- et comme le second vœu est fonction du premier, je vous souhaite d’aller le plus tard possible habiter ce séjour aussi peu recommandé que définitif, qui est Tanambao.»
Rappelons qu’en 1924, la peste faisait rage à Diégo et avait fait de nombreuses victimes à Tanambao, considéré comme un quartier « contaminé de peste ».Mais voyons le détail des vœux de la Gazette :
«Je vous souhaite des finances prospères, une administration prudente, économe et avisée.
Je souhaite la réfection des ponts de la route des Placers (l’actuelle route d’Ambilobe !) ; et que l’on puisse prochainement courir en bicyclettes et en automobiles sur les routes de l’intérieur et aller passer son dimanche à Vohemar, à Ambato, ou autres. (ce qui n’aurait rien d’impossible…avec une vraie route !) »
Les vœux suivants sont plus ciblés :
« Aux colons, je souhaite au plus tôt le chemin de fer de Diego-Marotolana de la main d’œuvre suffisante et d’abondantes récoltes ; aux commerçants : un chiffre d’affaires en rapport avec leurs généreux efforts ; à Antsirane : une voierie mieux entretenue, des travaux de canalisation d’eau plus rapides et surtout de l’eau en abondance, des cases plus saines, des loyers moins cher, un Maire élu (en 1924, le Maire, ou plutôt l’Administrateur –Maire était nommé par le Gouvernement Général).[...] Je vous souhaite une ligne de beaux et vastes quais de déchargement et d’embarquement, en un mot tout ce qui peut intéresser le présent et l’avenir de Diego-Suarez.
…Enfin, je souhaite l’union de tous les citoyens, de tous les contribuables sur un même terrain politique, dans le giron de la république démocratique.»

Et le journaliste, après avoir dit le mal qu’il pense des parlementaires, termine par cette phrase : « Je ne souhaite donc à personne d’être cet élu et à tous encore je vous souhaite bonne et heureuse année, joie, bonheur et prospérité – Amen.»
Ces vœux sont assez acariâtres ; pourtant l’auteur (qui signe « T ») va les rééditer, textuellement, à la fin de l’année 1927. C’est encore le mystérieux « T » qui signera des vœux moins agressifs en 1928.
Les vœux de la Gazette du Nord en 1928
On ne peut qu’être d’accord avec la phrase qui figure en première page de la Gazette du 29 décembre 1928 : « Souhaitons que les jours qui viennent voient s’effacer ou s’atténuer tout ce qui divise les peuples et, au sein d’un même peuple tout ce qui divise les hommes. » Cet appel à la fraternité humaine, que nous ne pouvons que partager est repris de façon plus ironique par l’éditorial de « T » :
« Bonne année
Le jour s’ensauve, un autre arrive, le temps court comme un lévrier »

Ces vers de Jean Richepin sont de circonstance en cette fin d’année. 1928 s’en va, chargé de tout son bagage de bonnes et mauvaises choses ;
Un rapide bilan va être dressé, demain.
1929 arrive avec son visage encore mystérieux, son doigt sur les lèvres, sa boîte à malices sous le bras.
Comme il paraît beau en ce premier jour, comme il semble vouloir réaliser tous les espoirs qu’on a mis en lui.
1929, c’est l’année où l’on sera heureux, où les hommes seront fraternels, où les amoureux ne seront plus qu’amour, où les affaires seront prospères à tous, où Diego sera doté de l’eau qui lui manque, où la chambre de commerce sous la direction de son valeureux Président prendra son essor, etc. etc.
La liste serait interminable de tout ce que l’on peut prétendre.
Et l’année passera comme les autres, avec ses bonnes et ses mauvaises choses. Mais elle renferme tant de possibilités qu’on ne peut que lui faire confiance, n’est-ce pas ?
Aussi, même ceux qui n’ont plus l’âge de recevoir des jouets mécaniques et des bonbons, tous se devront, avec le sourire de vous aborder avec le souhait traditionnel aux lèvres.
Bonne année, bonne santé !
Et à vous aussi, chers lecteurs, ce vœu de votre amie La Gazette du Nord »
.
La Gazette du Nord qui a paru jusqu’en 1936 n’a plus repris après 1928, cette tradition des vœux de bonne année aux lecteurs… peut-être parce qu’ils ne se réalisaient pas souvent ? C’est ce que l’on peut penser en lisant dans un autre journal, L’éclaireur qui paraissait dans les années trente, une chronique de fin d’année parue dans le numéro du 25 décembre et qui faisait la liste de l’« œuvre à réaliser » pour Diego-Suarez.

Les vœux de L’Eclaireur du 25 décembre 1934

Constatant les potentialités de la région nord de Madagascar, l’auteur de l’éditorial constate que « Il semble bien que jusqu’ici ces possibilités aient été bien peu utilisées et que beaucoup de résultats puissent être obtenus avec des moyens bien minimes. » Parmi ces résultats le journaliste met au premier plan « la nécessité d’équiper Joffreville au point de vue urbanisme, rues, eau et lumière ». Pour cela, il faudrait, d’après lui « quelques centaines de milliers de francs (qui) permettraient cette réalisation qui transformerait complètement la physionomie de cette localité » et qui en ferait « un centre d’attraction incomparable ».Il faudrait aussi que toute la région comprise entre Joffreville et Anivorano devienne « une immense région de production maraîchère, de fruits, d’élevage, susceptible de fournir jusqu’à Majunga et Tamatave » toutes les denrées nécessaires aux navires mouillant à Diego Suarez. Et l’éditorialiste de se demander « qui empêche cette région de produire une bonne partie des pommes de terre, des asperges, des artichauts, des choux-fleurs » et d’en approvisionner non seulement Madagascar mais Maurice et La Réunion ! Ce rêve (fou) est entravé par la mauvaise volonté de l’administration qui n’a jamais encouragé l’agriculture et qui n’a pas assuré le « programme de liaison routière à la base de tout l’édifice ». Les journaux dont sont extraits ces « vœux » pas toujours très réalistes étaient surtout destinés aux colons.
Ceux-ci sont partis mais nous pouvons reprendre à notre compte ces rêves qui étaient déjà ceux qu’exprimait, en 1892, le voyageur Kergovatz : « des routes et de l’eau ! » Plus de cent ans plus tard, je pense que la Tribune de Diego peut aussi souhaiter à ses lecteurs : de l’eau, des routes, une agriculture revivifiée, un développement touristique et surtout, surtout, reprendre à son compte la une de la Gazette du Nord de 1928 (presque cent ans !) :
« Souhaitons que les jours qui viennent voient s’effacer ou s’atténuer tout ce qui divise les peuples et, au sein d’un même peuple, tout ce qui divise les hommes ».
Bonne et heureuse année, lecteurs de la Tribune de Diégo !
■ Suzanne Reutt

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Semaines du 12 au 25 avril 2017
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