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Catégorie : Société
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Plus de la moitié des espèces de caméléons jusqu’ici découvertes l'ont été à Madagascar
Plus de la moitié des espèces de caméléons jusqu’ici découvertes l'ont été à Madagascar

Plus de la moitié des espèces de caméléon recensées dans le monde, soit une soixantaine, se trouvent à Madagascar. Cet animal étrange, qui fait partie intégrante de la culture populaire, est un des atouts de la biodiversité de la Grande Île et mérite sans doute d’être mieux connu et préservé

L’Union Internationale pour la Conservation de la Nature a indiqué en 2014 que 40 % des espèces de reptiles de Madagascar sont menacées d’extinction. D’après le comité pour les animaux de la CITES (Convention sur le commerce international des espèces de faune et de flore sauvages menacées d'extinction) les espèces les plus menacées à Madagascar sont Calumma brevicornis, espèce endémique de Madagascar, se trouvant sur la côte est de l’île. Calumma globifer, Calumma nasuta (son nom vient de la saillie en forme de corne sur son nez), Calumma parsonii, le deuxième plus grand caméléon au monde, il habite la forêt primaire de l’Est. Furcifer antimena, Furcifer balteatus, Furcifer campani, Furcifer minor et Furcifer willsii.

Un animal inquiétant dans la culture populaire
Le saviez vous ?
► Du règne animal, le caméléon fait partie de la classe des reptiles, ordre des squamates, sous-ordre des sauriens, famille des Chamaeleonidae.
► Le caméléon ne rampe pas, il marche et grimpe dans les buissons et les branches d’arbustes et d’arbres.
► La longueur de la langue varie selon les espèces, mais elle peut être aussi longue que le corps de l’animal et être projetée jusqu’à 200km/h
► Plus de la moitié des 120 espèces de caméléon recensées dans le monde se trouvent à Madagascar

Le caméléon est inséparable de la culture malagasy. Sa marche un peu hésitante et par à-coups est pour les Malagasy anciens une leçon de sagesse puisqu’elle symbolise la réflexion. Le caméléon figure dans les contes, proverbes et chants. Dans le nord, le caméléon est considéré comme « étant laid et un peu mystique, doté du pouvoir de porter la poisse à celui ou celle qui se moque de lui » explique Velonjara, un sexagénaire de Diego Suarez qui a sa propre analyse « tout cela est probablement dû au fait que ses yeux peuvent voir différents côtés, l'un indépendamment de l'autre et sa capacité de mimer les couleurs. » Bref des capacités qui ne sont pas facilement explicables, mais que les scientifiques ont quand même réussi à percer.

Changement d’humeur, changement de couleur

Les caméléons communiquent par leurs couleurs qui peuvent changer : maladie, stress, parade nuptiale… Il y a un an, la revue Nature communications a révélé le secret du changement de couleur des caméléons. Cette faculté appelée mimétisme leur permet de se fondre dans leur environnement. Les chercheurs ont étudié pendant des années la peau du caméléon et le mystère a été percé par des chercheurs de la faculté des sciences de l’université de Genève. Les pigments contenus dans la peau de l’animal ne sont, en fait, pour rien dans le mimétisme. « L’apparence du caméléon serait régi par un maillage de nano-cristaux situés en surface et jouant sur la manière dont la lumière se reflète sur la peau » rapporte maxisciences.com. La peau est composée en surface d’une couche de cellules appelées iridophores. Ces cellules sont capables d’émettre des couleurs en agissant sur la lumière qu’elles captent et en créant différents motifs colorés. Au repos, le caméléon est vert pour se camoufler parmi la végétation. Face à un rival ou une femelle à courtiser, le réseau de nano-cristaux se dilate et modifie la façon dont la lumière est reçue. L’animal affiche alors de nouvelles couleurs pour effrayer son rival ou de séduire la femelle.

© Frank Glaw, Jörn Köhler, Ted M. Townsend, Miguel Vences
Brookesia micra : le plus petit caméléon au monde
La plus petite espèce de caméléon au monde se trouve au Nosy Hara. Elle a été découverte en 2012 par une équipe du Museum d’histoire naturelle de Munich dirigée par l’herpétologiste (spécialiste des reptiles) Frank Glaw. C’est le soir que les minuscules caméléons ont été découverts, accrochés aux branches pour dormir, à 10 cm du sol. A l’âge adulte, Brookesia micra atteint à peine les 30mm. Comme pour les autres espèces de caméléon à Madagascar, la déforestation est la principale menace car les caméléons perdent leurs habitats. Au cours de cette expédition de l’équipe de Frank Glaw dans le Nosy Hara, quatre espèces de caméléons miniatures ont été décrites. Le petit caméléon figure sur la liste rouge de l’IUCN (Union internationale pour la conservation de la nature) et classée quasi-menacée. Si la pression à Nosy Hara augmente, l’espèce pourrait passer de cette situation à la classe « en danger critique d'extinction ». Le feu est la principale menace ainsi que la baisse continue de la qualité et de la zone d'habitat.
Photo : © Frank Glaw, Jörn Köhler, Ted M. Townsend, Miguel Vences
Des yeux indépendants et une langue comparée à un ressort

Les yeux du caméléon peuvent se mouvoir, indépendamment, l’un de l’autre. Cette faculté lui permet de détecter les mouvements dans les alentours sans bouger ni même tourner la tête. Dans l’appréciation de la distance entre lui et sa proie, les yeux adoptent une vision binoculaire, c’est-à-dire que les deux yeux sont utilisés simultanément. A part cette adoption de la vision binoculaire pour apprécier la distance, le caméléon voit deux images différentes. Ce qui lui permet de détecter ses proies et de surveiller les prédateurs.
La langue protractile du caméléon est encore plus impressionnante que ses yeux. Elle lui permet d’attraper avec précision la proie, à distance. L’extrémité de la langue couverte de mucus gluant n’offre aucune échappatoire. La longueur de la langue varie selon les espèces, mais elle peut être aussi longue que le corps de l’animal et être projetée jusqu’à 200km/h voir plus.

Menaces sur les caméléons

Plus de la moitié des espèces jusqu’ici découvertes sont à Madagascar. D’autres espèces se retrouvent dans le Sud de l’Espagne, sur les autres pays d’Afrique, sur les îles de l’Océan Indien, la péninsule Arabique, Sri Lanka, Inde, au Yemen et en Arabie Saoudite.
En 2014, des dizaines d’espèces de caméléons étaient menacées d’extinction. L’estimation du Groupe des spécialistes du Caméléon, CSG, fait état d’une menace qui pèse sur plus d’un tiers des espèces répertoriées. L’étude réalisée sur 184 espèces a démontré que neuf espèces sont en danger critique d’extinction, 37 sont en voie de disparition, 20 dans la catégorie « vulnérable ». La réalité géographique contribue à cette situation critique. De nombreuses espèces de caméléons se trouvent en effet dans un éventail géographique restreint. La plupart des espèces sont endémiques. Les menaces qui pèsent sur les espèces découvertes à Madagascar pèsent à titre d’exemple sur la moitié des espèces de caméléon du monde entier. Les habitats isolés subissent la pression des activités humaines. La préservation des forêts primaires est nécessaire pour la protection des espèces.

Existence solitaire et routinière

Dès leurs naissances, les caméléons sont indépendants. Ils grimpent seuls dans les arbustes et chassent. Il est rare voir impossible de retrouver grouper en un seul endroit plusieurs caméléons. Chaque caméléon a son territoire et le défend jalousement contre ses congénères. Lorsqu’il quitte son gîte (buisson ou arbuste) c’est pour aller suivre un trajet routinier pour se chauffer au soleil le matin. La chasse, le caméléon le pratique en solitaire. C’est seulement au moment de la reproduction que le caméléon supporte la présence de ses semblables durant laquelle les combats entre mâles sont violents et les femelles sont agressives entre elles. Les caméléons sont insectivores, certaines espèces se nourrissent aussi de végétaux. Ils sont ovipares, mais d’autres espèces conservent les œufs dans leur ventre et ce jusqu’à l’éclosion des œufs. Pour les ovipares, les œufs sont enterrés dans le sol. Dépendant de la température, l’incubation varie de 6 à 9 mois suivant l’accouplement. Une femelle pond jusqu’à 30 œufs (plus chez certaines espèces), mais très peu (parfois moins de dix) naissent vivants. Le caméléon devient adulte (généralement) à 18 mois, la maturité sexuelle est atteinte à 9 mois chez certaines espèces telles que le caméléon calyptratus. Le caméléon vit de 4 à 8 ans.

Caméléon panthère : espèce spécifique du nord de Madagascar

Cette espèce très prisée pour l’élevage en captivité est importée par l’Europe. Les couleurs du caméléon panthère pourraient expliquer cette préférence. Elles sont ternes chez la femelle et plus vive chez le mâle. Ces couleurs varient selon l’endroit où l’espèce se trouve. Vert et bleu turquoise pour les espèces de Nosy Be, blanc et rouge pour Toamasina, vert brillant avec des bandes verticales rouge foncé et une ligne horizontale blanche épaisse sur chaque flanc à Diego Suarez, fond vert kaki et rouge foncé à Maroantsetra, plusieurs couleurs, du vert, rouge, orange, jaune avec une ligne horizontale bleue à Ambilobe. La durée de vie du caméléon panthère est de 6 ans maximum, sa taille peut atteindre les 55 cm (avec la queue) chez les mâles et 35 cm chez les femelles. Les caméléons femelles sont en effet plus petits que les mâles. Par ailleurs, la proéminence des appendices et des crêtes permet de distinguer les deux sexes
■ V.M

Brookesia brygooi est endémique de Madagascar. Il vit dans la litière de feuille d’arbres à feuilles caduques
Brookesia brygooi est endémique de Madagascar. Il vit dans la litière de feuille d’arbres à feuilles caduques

Caméléon panthère, une espèce spécifique du nord de Madagascar
Caméléon panthère, une espèce spécifique du nord de Madagascar

Précédent détenteur du record de l’espèce de caméléon de la plus petite taille, Brookesia minima se rencontre fréquement dans le parc de la Montagne d’Ambre
Précédent détenteur du record de l’espèce de caméléon de la plus petite taille, Brookesia minima se rencontre fréquement dans le parc de la Montagne d’Ambre

Photos : PZ