Dans la soirée du 25 avril, la Haute Cour Constitutionnelle malgache a publié sur son site web son avis sur les deux demandes
L’intention du Président de la République de réviser la Constitution a essuyé des critiques depuis le 19 avril, date du décret, pris en conseil des ministres portant convocation des électeurs pour un référendum. L’avis de la Haute Cour Constitutionnelle sur le pouvoir du Président de soumettre cette révision a été publié dans la soirée du 25 avril sur son site web
Le décret avait fixé la date du vote au 27 mai, c’est-à-dire qu’il était prévu se faire parallèlement aux élections législatives. La campagne électorale référendaire devait donc débutait le 27 avril puisque l’article 56 de la loi organique 2018-008 fixe la durée de la campagne La durée de la campagne électorale et référendaire officielle à 30 jours. Les critiques de la classe politique et de la société civile ne se sont pas fait attendre. Elles se portaient surtout sur l’étendue du pouvoir du Président de la République, qui depuis le 13 février a le pouvoir de légiférer par voie d’ordonnance. Le mandat des députés ayant expiré le 5 février. Les uns et les autres ont estimé que la décision (par ce décret) est inconstitutionnelle. L’article 104 a été notamment évoqué. Il porte des précisions sur le pouvoir de légiférer du Président de la République. Il est délégué par le Parlement pendant un temps limité et pour un objet déterminé. La délégation de pouvoir concerne par ailleurs des mesures de portée générale sur des matières relevant du domaine de la loi.
Précipitation, chevauchement et confusion, principaux arguments à la base des critiques
Les articles 161, 162 et 163 de la Constitution (sur la révision de la Constitution) étaient également soulevés. La période, trop courte, entre la convocation des électeurs et la date du vote a été de plus très contestée. L’article 51, alinéa 4 de la loi organique portant régime général des élections et référendums, précise qu’en matière de consultation référendaire, lorsque le collège électoral est appelé à se prononcer sur un projet de révision de la Constitution ou une question importante à caractère national « le référendum porte sur une seule matière et les questions doivent être formulées avec objectivité, clarté et précision ». A quelques jours du début de la campagne électorale référendaire, les articles, objets de la consultation n’étaient pas encore connus des électeurs.
Le Comité National d’Observation des Elections (KMF-CNOE) a qualifié d’ « inattendue » cette convocation. L’auteur d’ouvrages politiques, Toavina Ralambomahay, a quant à lui interpellé sur le risque de chevauchement « les candidats aux législatives peuvent donc faire campagne pour le référendum dès le 27 avril... On verra qui osera refuser ces révisions et oseront-ils se déclarer opposition légaliste » a-t-il indiqué.
Des décisions inconstitutionnelles
Le 24 avril le Président de la République a saisi la Haute Cour Constitutionnelle pour un avis sur son pouvoir de soumettre directement au peuple le vote d’une loi constitutionnelle par voie référendaire. Le même jour, Rivo Rakotovao, Président du Sénat a aussi déposé une demande d’avis qui concerne surtout l’étendue du pouvoir de légifération du Président de la République (article 104 de la Constitution) et l’interprétation de la « nécessité jugée impérieuse », prévue les articles 161 et 162 de la Constitution.
Dans la soirée du 25 avril, la Haute Cour Constitutionnelle malgache a publié sur son site web son avis sur les deux demandes
Article premier.- La démocratie semi-directe prévue par l’article 5 de la Constitution implique la coexistence d’organes représentatifs comme le Président de la République ou les Assemblées parlementaires et des procédures d’interventions populaires directes comme le référendum.
Article 2.- En vertu de l’article 55.5 de la Constitution, le Président de la République dispose du droit d’initiative pour l’organisation d’un référendum de consultation ou de ratification mais pas en matière de révision constitutionnelle en référence au Considérant 6.
Article 3.- La délégation du pouvoir de légiférer de l’article 104 de la Constitution donne la possibilité au Président de la République de prendre des textes de loi ordinaire ou organique par ordonnance mais pas de loi référendaire, relevant du pouvoir constituant dérivé.
Article 4.- Le Président de la République dispose du droit d’initiative référendaire en matière de révision de la Constitution, sous réserve du respect de l’ensemble des prescrits constitutionnels prévus par le Titre VI de la Loi fondamentale…
Abrogation du décret par l’Exécutif ou annulation par la Haute Cour Constitutionnelle
Suite à cet avis de la HCC, certains médias avancent que puisque le Président de la République n’a pas le pouvoir de soumettre cette révision de la Constitution, le référendum n’aura pas raison d’être. Deux possibilités sont alors à envisager, soit le décret est abrogé en conseil des ministres soit la HCC décide de son annulation. Cette seconde ne peut être faite que suite à une requête en annulation du décret en question. Jusqu’à aujourd’hui, seule la KMF-CNOE a déposé cette requête aux greffes de la HCC. Il a déposé aux greffes de cette Cour une requête en annulation du décret 2019-079 portant convocation des électeurs à la révision constitutionnelle. La KMF-CNOE estime qu’il a qualité à agir puisque le décret de convocation des électeurs en question est un acte préliminaire aux élections. Il s’agit donc de contentieux électoral. Pour le KMF-CNOE, la démarche adoptée dans la prise de décision de l’administration quant à la tenue de ce référendum n’est pas logique. Dans la requête, elle souligne « la demande d’avis doit être effectuée logiquement avant même la prise d’une décision de l’administration (avant la convocation des électeurs, NDLR) ». Dans l’ensemble de sa requête, le KMF-CNOE conteste en cinq motifs, sur le fond, le décret 2019-079 et demande son annulation.
■ V.M