‘‘ La langue malagasy est unifiée, mais présente de multiples variations d’une région à une autre, c’est la nature de ces différences qui nous intéresse ’’ Ileana Paul, Chercheur en linguistique. Photo: Fita
Du 3 au 7 juin s’est tenu au restaurant Ankarana annexe Antsiranana le colloque international sur la variation dialectale. Les présentations ont évoqué le dialecte vezo, le sihanaka, le betsileo, l’antakarana… quelques uns des dialectes malgaches
La faculté des lettres et sciences humaines des universités de Fianarantsoa, d’Antananarivo et d’Antsiranana ont participé à ce colloque. Des professeurs de l’université de Harvard-Boston et de l’université de Floride ont pris part à cette rencontre. Le colloque ainsi que le projet sur les recherches réalisées pendant trois ans sont financés par le Conseil de recherches en sciences humaines du Canada.
Ileana Paul de l’university of Western Ontario, chercheur principal du projet sur la variation dialectale à Madagascar explique « le gouvernement du Canada finance ce projet de recherche linguistique parce qu’il aide à la formation des étudiants canadiens en linguistique et aussi parce que les résultats des recherches s’appliquent à d’autres domaines. Le projet vise en particulier la syntaxe et la morphologie et propose une étude de la micro-variation entre les dialectes, basée sur les enquêtes de terrain ». Le projet a débuté en 2011 et c’est lors de ce colloque que les résultats des études sur les différentes variétés de la langue malagasy ont été présentés aux participants, entre autres : « Propriétés syntaxiques du pronom personnel sujet ‘za/zaho’ du parler antakarana », « étude comparative de l’emploi de ‘ndraiky’ et ‘zeñy’ dans le PN et le MO présentée par Sehenosoanambinina Rakotozafy Toky et Mathilde Ambroise Zafindrazana. Les participants au colloque sont des professeurs, des chercheurs en linguistique et des étudiants en langue malagasy et français. « La langue malagasy est unifiée, mais présente de multiples variations d’une région à une autre, c’est la nature de ces différences qui nous intéresse » explique encore le chercheur principal Ileana Paul. De 2011 à 2014, les équipes locales chargées de l’exécution du projet constituée d’encadreurs et d’étudiants des universités d’Antsiranana et d’Antananarivo ont étudié ces micro-variations des dialectes dans les régions d’Antsiranana, Mahajanga et Antananarivo.
Lors de ce colloque, d’autres chercheurs linguistes ont présenté les résultats de leurs travaux tels que les sujets portant sur « le vakinankaratra, parler hybride merina-betsileo », « l’utilisation de terminent ‘ny’ en sihanaka »... Il y a eu également présentation des recherches sur les dialectes malgaches réalisées par les professeurs Leonie Bouwer ,Tim O’Neill, Eric Potsdam, Maria Polinsky et Lisa Travis. Le traitement informatique des variations terminologiques malgaches a également été présenté aux participants.
Pr Roger-Bruno Rabenilaina
Pour une maîtrise de la langue malagasy dans l’information et la communication
Le Professeur Roger-Bruno Rabenilaina a enseigné la linguistique malgache à la faculté des lettres et sciences humaines à l’université d’Antananarivo de 1969 à 2001. Du point de vue administratif, le professeur est à la retraite, mais jusqu’à maintenant, il enseigne le linguistique dans les deux universités d’Antananarivo et Toliara.
Le Pr Roger-Bruno Rabenilaina est le directeur des études de l’Ecole Supérieure de l’Information et de la Communication, St Michel Amparibe. Il a été contacté par l’école en 2001 pour « hanagasy » (malgachiser) l’enseignement. Sa réponse : « Je ne suis pas d’accord en ce qui concerne l’emploi de ce terme de malgachisation car ce qui est indispensable c’est la maîtrise de la langue et l’adaptation de la langue malagasy aux techniques d’information et de communication ». Début à cette adaptation et maîtrise du Malgache, l’école fut baptisée SAMIS-ESIC : Sekoly Ambony Momba ny Ita sy ny Serasera, ita signifie Information et serasera, communication. Le Pr Roger-Bruno soutient que pour mener le pays vers le développement il faut orienter la langue vers un but productif, qu’elle ait un apport constructif. Depuis 2007, les étudiants du SAMIS-ESIC présentent leur mémoire de Licence en malgache.
Information
Certes, utiliser les langues étrangères pour communiquer et donner des informations, c’est s’ouvrir au monde. Cependant, le Pr Roger-Bruno Rabenilaina estime qu’il faut maîtriser la langue maternelle et être capable d’informer en malgache. Dans les différentes régions, il souligne l’importance de la présentation du journal et d’ailleurs de toutes les activités journalistiques en dialecte.
Communication
« Les dialectes sont riches en vocabulaires, il faut les utiliser pour enrichir la langue maternelle » soutient le Professeur, mais pour cela il faut que les personnes issues des différentes régions de l’île les utilisent couramment dans leur dialogue même en dehors de leurs groupes d’origine. Le Pr Roger-Bruno Rabenilaina regrette que les députés ne communiquent pas à l’Assemblée Nationale dans leurs dialectes. Ce qui permettrait pourtant, d’après lui, de trouver les vocabulaires adéquats suivant les contextes.
■ V.M