Le substrat de la langue malgache vient du Pacifique, et fait partie des langues austronésiennes parlées aussi en Asie du Sud-Est. Il a été enrichi, entre autres, par des mots bantus et swahili, mais aussi plus tard des mots anglais et français.
Source : http://terangaweb.com/histoire-de-la-langue-malagasy/
Le mois de juin a été consacré «mois de la langue malgache», l’occasion de se pencher sur son évolution. Des vocabulaires se perdent, différentes expressions tombent dans l’oubli ou que seules les générations plus anciennes comprennent. La langue malagasy, que ce soit celle que l’on appelle officielle ou les dialectes des différents groupes sociaux des quatre coins de l’île subissent des déformations ou des altérations
Madagascar a la particularité au niveau de sa population d’être composée de différents groupes sociaux « foko » avec leurs dialectes propres, mais qui parviennent malgré les nuances à se comprendre. Ces divers dialectes tout comme la langue officielle subissent les influences extérieures et ont besoin d’être préservées. FIMPIMAMA qui est la fédération des conservateurs de la culture malagasy a lutté pour que le mois de juin soit consacré à la langue malagasy. Pour l’union des poètes et des écrivains malagasy, Havatsa UPEM, ce mois de la langue malagasy est important dans la mesure où il s’avère actuellement primordial de se pencher vers la jeunesse dont la plupart ne sait plus comment employer correctement la langue maternelle. Lors de l’ouverture officielle de la célébration du mois de la langue malagasy, un texte, qui deviendra la politique d’Etat de la langue malagasy, une fois adopté par le parlement. Ce document stratégique a été remis par le président de l’Académie malagasy RajaonaAndriamananjara au Président de la République. Cette actualité d’envergure nationale fait pencher sur le contexte à Antsiranana. Dans le nord de Madagascar, le dialecte est fortement marqué par la langue française et inquiète les plus âgés et les universitaires.
Le dialecte du nord, du « franco-malagasy » ?
Dans la région nord de l’île, les Malagasy ont plus tendance à parler en malagasy du nord en y associant quelques vocabulaires français. Le professeur en anthropologie, JaoveloDzao explique les origines de ce phénomène.
Les Diégolais pratiquent plus le franco-malagasy que le malagasy pur et le malagasy officiel. Selon le professeur JaoveloDzao, ce phénomène s’explique par l’arrivée des français dans la ville depuis les années 1840. Les français se sont d’abord installés dans cette partie nord de l’île, à Nosy Be Hell Ville, qui était un port d’attache et nommé plus grand port de France dans l’Océan Indien en 1850. Ils y sont venus bien avant la colonisation de Madagascar. Puis, le capitaine Pierre Passot a lancé un accord de protectorat France-Madagascar entre les Français et le roi Tsimihety qui gouvernait le nord. « Ce long moment passé avec les Français a eu un très grand impact sur le dialecte de la population du nord dû à un échange entre langue et culture qu’il y a eu. Le dialecte malagasy du nord a fait un emprunt à la langue française et l’a adapté à sa propre langue. Ce qui donne jusqu’à aujourd’hui cette tendance à associer ces deux langues dans les phrases les plus habituelles » explique le Professeur. Comme « ano ma baka l’enterrement ? » (tu viens de l’enterrement ?) ou encore « alôantsikaandeha l’école ! » (allons à l’école). Mais avant cette transformation, les gens du nord s’exprimaient en leur propre dialecte. D’après le Pr JaoveloDzao, « il y avait d’abord la langue malagasy pure, propre à cette partie de l’île. Puis cette langue a connu une transformation en s’associant à la langue malawide la Polynésie et du Malaisie aux IVe et Ve siècles. Vers les VIIIe et IXe siècles, après l’arrivée des arabes, le Sorabe a été introduit dans cette partie de l’île et une nouvelle fois la langue a associé des vocabulaires arabes à son lexique. C’est de l’Arabe que nous viennent les vocabulaires comme alatsinainy (lundi), talata (mardi), ainsi que les mois lunaires telalahamady (bélier). Après l’arabe vient la langue kiswahili de Tanzanie et de Zanzibar. Les mots comme karibo (entrez), katakata (banane) nous viennent de cette langue. Ce n’est qu’aux XIXe siècles qu’il y a eu une autre adaptation du dialecte du nord avec la langue française. Toutes ces transformations et adaptations ont formé le dialecte du nord que nous connaissons en ce jour ».
Une autre cause de la franco – malgachisation du dialecte du nord vient du temps de la royauté. Radama I, était proche des anglais et ceux-ci lui ont aidé à unifier et pacifier tout le royaume de Madagascar. De ce fait, un anglais nommé Robert Farquart a soumis un accord à Radama Ià l’issue duquel le roi sera nommé roi du royaume de Madagascar avec l’aide des anglais. Aussitôt l’accord signé, les anglais ont envoyé des officiers, des soldats et des matériels pour aider le roi dans sa tâche de pacification et de réunification de la grande île. Ce qui a été chose faite. En ces temps de pacification, chaque province pouvait parler leur dialecte ou bien parler le dialecte des Hauts plateaux. Mais depuis la mort de Radama I, Ranavalona I a pris le pouvoir et a déclaréqu’ « entant que reine du royaume de Madagascar, sa langue (la langue merina) sera la langue malagasy officielle et le peuple malagasy devra l’employer ». A partir de cette loi a commencé le clivage entre les côtiers et les hauts-plateaux. Selon le Pr JaoveloDzao, « dans la partie nord de l’île ? il existe deux variantes dialectales, le sakalave et l’antakarana. Ce sont les dialectes utilisés par la population de cette localité, mais depuis la loi de Ranavalona I en rapport à la langue merina qui doit devenir la langue malagasy officielle et qui doit être employée par tous, ceux qui viennent des côtes ont connu un sentiment de frustration qui a mené vers le refus d’employer cette langue qui leur a été imposée. Ce qui fait qu’aujourd’hui, cette frustration et ce rejet les ont fait tourner vers l’emploi d’une toute autre langue, le Français, quitte à l’associer aux dialectes respectifs ».
D’après le père JaoveloDzao, deux tendances dominent en ce moment quant au devenir de la langue officielle malagasy. « Soit le dialecte merina domine et efface les autres dialectes de l’île… Elle sera donc la seule langue existante et sera la langue officielle, soit la promotion des dialectes côtiers par les artistes, en collaboration avec les recherches et les travaux effectués par les linguistes dans la réunification des tous vocabulaires existantes dans les différents dialectes existants dans l’île sur une thématique, vont créer une synthèse de vocabulaire qui formera une nouvelle langue officielle qui sera une langue de synthèse » a-t-il expliqué.
Etrangers à Madagascar : parler malagasy pour mieux communiquer
Maitriser la langue malagasy pour les étrangers qui vivent à Madagascar relève soit d’une obligation soit de leur propre volonté, mais l’objectif est toujours l’intégration. Les étrangers en mission de volontariat ou de bénévolat dans la ville de Diego Suarez nous parle de cette adaptation.
Pour Maryse Sahondra Parent, volontaire pour l’ONG Azimut, employer le malagasy est une manière de mieux s’exprimer et de mieux se faire comprendre. Maryse est née à Madagascar, mais a passé une grande partie de sa vie au Canada. Elle est revenue à Madagascar en 2009 en tant que volontaire pour l’ONG Azimut. D’après elle, « tout d’abord, apprendre et parler malagasy m’intéressent. Cela me permet de mieux m’intégrer dans la société. Quand je parle en malagasy, les gens sont à l’aise avec moi. Ils ne me considèrent pas tout à fait comme une étrangère. C’est aussi important pour moi puisque la langue malagasy me permet de m’exprimer sans interprète. Avant j’ai souvent eu cette frustration de devoir passer par un interprète pour faire savoir ce que je pense. De ce fait cela m’a poussé à apprendre et à parler la langue malagasy afin de m’exprimer par mes propres moyens. De mon point de vue, apprendre et parler la langue malagasy n’est pas difficile grammaticalement. C’est une langue créolisée, chantante et très rentre dedans pour ce qui est du dialecte du nord. Il suffit de l’apprendre comme si c’était une poésie ».
Ian Gorecki a, quant à lui, une toute autre idée concernant son emploi de la langue malagasy. « En tant que volontaire pour Peace Corps à Madagascar, dans le but de respecter la culture de la nation où nous sommes volontaires, il est impératif d’apprendre sa langue officielle et ses dialectes. Pour les volontaires de Peace Corps à Madagascar, nous devons d’abord suivre une formation de trois mois à Mantasoa Antananarivo afin d’apprendre la langue malagasy et de pouvoir communiquer avec les natifs du pays. C’est seulement après avoir réussi à l’examen de malagasy en fin de formation que nous pouvons prendre un poste et continuer notre activité de volontaire. Dans le cas contraire, nous devons repasser l’examen. Pour nous, parler malagasy, c’est avant tout faciliter la communication avec les natifs. Aussi, cela facilite la coopération et réduit la distance entre nous. Apprendre la langue malagasy n’est pas difficile si l’apprentissage s’associe de près avec la pratique. Mais pour moi, à part l’obligation d’apprendre le malagasy en tant que volontaire de Peace Corps, je trouve qu’il est utile d’apprendre pour comprendre ce qui se passe à Madagascar, ce qui se déroule autour de soi ».
Difficile de parler uniquement malagasy au quotidien
Manohy Ranaivoarison qui est étudiante en quatrième année en communication à l’université d’Antananarivo utilise la langue malagasy pure pour les travaux académiques dans lesquels il est impératif de faire un résumé en malagasy comme dans les projets d’étude, les dossiers de recherche et les mémoires de fins d’étude.
Pour les étudiants, il n’est pas évident d’employer la langue malagasy sans introduire un mot français dans une phrase. « Je m’efforce à utiliser le malagasy pur lors des cours de malagasy durant lequel il est impératif d’utiliser le malagasy. En fait, dans la société de Diego Suarez où je vis, tout le monde parle franco-malagasy. De plus, j’ai toujours étudié dans des écoles d’expression française, d’où le fait que je combine souvent le français et le malagasy pour m’exprimer » explique Marina Olivaresse, étudiante en quatrième année en lettres françaises à l’université de Diego Suarez.
Etudiant en troisième année en lettre française à l’université d’Antsiranana, Dina Ratovondranto emploie le malagasy seulement dans les discours qui doivent être écrits et prononcés en malagasy. Mais il pense que « entant qu’intellectuel nous devons nous adapter au mode de communication des autres. Ce qui fait que nous parlons rarement le malagasy pur à Diego Suarez vu que la majorité de la population parle le franco-malagasy. Nous devons nous y adapter pour faciliter notre communication avec autrui ».
■Raitra