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Catégorie : Culture
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Foire et atelier sur le livre à Diego Suarez
« Les malgaches ne lisent pas ou les malgaches n'aiment pas lire », ces affirmations ont été entendues à maintes et maintes reprises lors de la foire et atelier sur le livre organisée par l'Association des Editeurs de Madagascar à l'Alliance française de Diego Suarez du 10 au 12 novembre dernier

Que faire alors pour que les Antsiranais apprécient la lecture ? C'est autour de cette question qu'éducateurs, autorités locales, responsables de l'enseignement se sont concertés au cours des deux premiers jours.

  Le Professeur Vaohita, président de l'Alliance française et enseignant à l'Université d'Antsiranana a trouvé les mots justes, empruntés à l'écrivain Saint-Exupéry, pour résumer la gravité de la situation. « Tous ces enfants qui ne savent pas lire sont des " Mozart assassinés " » a-t-il dit. Il n'y a qu'à voir le petit nombre de visiteurs de la vente exposition pour constater le très peu d'importance que l'on accorde à la lecture. Habituellement, une foire attire du monde. Cela n'a pas du tout été le cas lors de cette foire du livre car le public n'était pas au rendez-vous. En général il n'y a que ceux qui sont venus le premier jour qui revenaient. Heureusement les plus jeunes (écoliers et collégiens) ont été dirigés par leurs enseignants et ont pu visiter les stands.

C'est lors des ateliers portant sur le thème : « Le livre, instrument par excellence du développement » que les participants ont été les plus nombreux (45 personnes) et très motivés. Il en est ressorti que l'idée, selon laquelle les futurs enseignants, c'est-à-dire ceux qui sont ou seront en formation, devraient avoir une méthodologie pour faire aimer le livre aux enfants, sera transmise au Ministère de l'Education Nationale. Que les ZAP (Zones Administratives et Pédagogiques) feront un rapport à propos de tout ce qui se passe au niveau de leur localité en ce qui concerne la lecture et les livres à la Circonscription scolaire, et cette dernière à la Direction Régionale de l'Education Nationale.

La Commune Urbaine de Diego Suarez, par la voix de l'adjointe au maire, a émis la volonté d'ouvrir une autre bibliothèque municipale pour que tout le monde, sans exception, puisse lire les ouvrages et documents qu'il préfère. Mais de nombreux obstacles à la réalisation de tels projets subsistent encore et qu'il est nécessaire de trouver des solutions à long terme. La plupart des écoles et collèges publics ont leur bibliothèque, mais le problème se situe au niveau de l'encadrement des bibliothécaires qui sont souvent des fonctionnaires qui ne tarderont pas à partir à la retraite. Ces personnes ne sont pas en mesure d'apprendre aux enfants comment manipuler, comment lire ces livres donc comment aimer la lecture. Quant aux parents, ils n'ont pas conscience de ce que le livre peut apporter de bénéfique à leurs enfants. Au niveau des éditions, les livres écrits en langue malgache ne sont pas très nombreux et on les trouve rarement dans les librairies et bibliothèques des provinces. L'avancée rapide des nouvelles technologies de la communication contribue aussi à la perte de la valeur du livre et pourtant « un livre se garde et se lit à n'importe quel moment et n'importe où, à part les informations qu'il fournit, le livre nous permet de nous évader. De plus, le livre nous laisse libre » explique Mme Raveloarison Sylvia, responsable de la médiathèque de l'Alliance française Antsiranana lors de son intervention à la conférence sur le rôle du livre dans le développement. Le représentant de la DREN M.Zarabe Marcellin a ajouté que ce sont les livres qui font vivre et qui conservent la culture.

Bref, comme le dit la grande écrivaine malgache Esther Rasoloarimalala Randriamamonjy : « La lecture est une habitude et en même temps une culture qu'il faut créer et à laquelle chaque famille, les écoles, chaque éducateur devraient se sentir responsables »

Production de livre à Madagascar, il y a un équilibre difficile à trouver

Cette foire et atelier sur le livre ont été organisés par l'AEdiM ou Association des Editeurs de Madagascar, grâce à un soutien financier accordé par l'UNESCO sur le fonds international pour la diversité culturelle. Le Président de l'association M. Rabenoro Claude a développé les objectifs de l'AEdiM. Il s'agit entre autres de la lutte contre la censure et du développement de la solidarité des membres. L'association dont le siège est au CITE Ambatonankanga Antananarivo regroupe actuellement neuf maisons d'édition. L'organisation de foires et de rencontres professionnelles entrent dans le cadre des activités de promotion de l'association pour relancer le secteur de l'édition à Madagascar.
Selon le directeur de la librairie mixte et conseiller de l'AEdiM, M.Jean Razakasoa, beaucoup d'auteurs font appel aux maisons d'édition pour la promotion et la diffusion de leurs œuvres. Malheureusement en raison de nombreuses contraintes techniques, financières et commerciales, ceux qui parviennent à leurs objectifs ne sont pas nombreux. La production d'un livre dépend de trois impératifs : « le livre doit être de bonne qualité, à un prix abordable et limité en nombre d'exemplaires » d'après toujours M.Jean Razakasoa. De plus « le processus de création d'un livre est relativement long » selon M.Claude Rabenoro. Il est très difficile alors de trouver un équilibre car le pouvoir d'achat des acheteurs de livre malgaches est très limité alors qu'ils ne sont pas nombreux, un éditeur ne peut par exemple tirer que 5000 exemplaires d'un livre.

C'est à cause de cette limitation que l'on n'arrive plus à trouver des livres de certains auteurs malgaches dans les librairies, on peut toujours faire une commande aux librairies, mais le problème peut aussi être ailleurs. Si l'auteur est décédé, ce sont ses héritiers qui décident, soit de continuer à faire des tirages sous les anciennes ou de nouvelles conditions soit d'arrêter tout simplement et les livres n'arrivent plus dans les mains du lecteur.
■ V.M.