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Catégorie : Histoire
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La Rade de Diego Suarez au début du XXème siècle
Le passé du port de Antsiranana a été brillant, au moins autant pour sa partie militaire et sa forme de radoub que pour son port de commerce, dont l’activité est très connectée aux productions industrielles, qui se situent dans son espace d’action (PFOI, Salines).

La population d’Antsiranana est très attachée à son port et aux emplois qui y sont liés. Un exemple : les passagers des navires de croisière ont toujours fait l’objet d’un excellent accueil aussi bien de la part de la population, que de la part de la Mairie et de l’Office du Tourisme.
Par ailleurs, la forme de radoub constitue un équipement industriel très attractif, avec possibilité d’une fertilisation croisée, entre le port et le chantier naval.

 

● Le contexte géographique et humain


Antsiranana en 1885La ville d’Antsiranana est la plus grande ville du nord de Madagascar . Cette ville, se situe au Sud de la rade de Diego Suarez, rade qui s’ouvre sur la cote Est, et qui offre un développement de cote de longueur 156 km.
L’Ankarana qui est connue depuis le X ième siècle (vestiges découverts dans la Montagne des Français), a été fréquentée par les marins arabes venant d’Oman, du Yémen, de Somalie, et qui pratiquaient le commerce des escalaves, de l’écaille et de la cire. Ces marins transmirent leur religion et une partie de leur culture ; ce qui explique la forte islamisation de la région de Diego Suarez.
Le premier royaume de l’Ankarana fut fondé par des Sakalaves de Menabé et de Boina, chassés vers le Nord par une guerre intestine. Le roi règne toujours sur le Nord de Madagsacar mais son pouvoir est uniquement symbolique, et son rôle principal consiste à perpétuer les traditions et les trois rites principaux :
- Tsangantsainy : fête collective qui a lieu tous les 5 ans et qui a pour objectif de rappeler l’unité historique du peuple ;
- Tsakafara, dont le rituel a pour objectif de demander l’aide des ancêtres, pour l’accomplissementd de certaines actions ;
- Réincarnation des morts.



Antsiranana vers 1900

● La découverte et les premiers développements de la baie de Diego Suarez


Au début du XVIème siècle, une escadre Portugaise de 13 navires sillonnait l’Océan Indien ; l’un de ces navires partit à la dérive, et son commandant, Diego Diaz, fut donc le premier Européen à découvrir la grande ile, le 10 Août 1500.
En Février 1506, l’Amiral Herman Suarez reconnaissait les lieux et c’est ainsi que Antomabokala, ancienne capitale de l’Ankarana, acquit son nom de Diego Suarez, qui provient de la contraction du prénom du capitaine et du nom de l’Amiral. En 1635, la baie fut ainsi, mentionnée pour la première fois, sous ce nom, par le pilote français Berthelot, auteur d’une carte orientale d’Afrique et de Madagascar.
En 1824, la baie est explorée par l’hydrographe anglais Owen, puis en 1833, le Capitaine Bigeault, commandant La Nièvre, parcourt la côte Nord Est, pour effectuer des relevés hydrographiques.
Mais cette rade, qui est parfaitement située sur le trajet de la route des Indes, ne manque pas d’intéresser les nations européennes et par le traité Franco Malgache du 17 Décembre 1885, la France est autorisée à occuper Diego Suarez.

Le port au début du siècle


● La construction du port (Chronologie)

Construction d'une jetée

Au moment où la France prend possession du Territoire de Diego-Suarez, il n’existe aucune réelle installation portuaire : les boutres qui assurent le commerce de la Baie mouillent au « port des boutres » à Orangea ; les quelques pêcheurs installés dans la baie laissent leurs barques à Antsirane.

Cap Diego ou Antsirane ?
« Le petit détroit appelé « port de la Nièvre » offre deux mouillages principaux : l’anse d’Antsiranana au sud et l’anse du Cap Diego au nord »
Cap Diego est mieux protégé des attaques éventuelles mais le mouillage est moins sûr.
On y construira cependant un petit quai en pierres. Mais Antsirane offre un meilleur mouillage et accueille déjà des bateaux de commerce et des boutres.

En 1885, le premier gouverneur militaire de Diego réside sur « La Dordogne », gros transport ponton ancré port de la Nièvre.
  Le déchargement se fait alors par des chalands :« A peine à l’ancre, de nombreux canots se détachent de terre pour venir à bord, tandis que les remorqueurs du port nous amènent des chalands pour le débarquement de la cargaison » (Une semaine à D/S de M.de Kergovatz 1885)


2 appontements sont construits :
- un appontement officiel construit par les militaires et muni d’escaliers et de rampes,
- un appontement de la Compagnie des Messageries Maritimes, long de 60m, équipé d’une grue (en 1890).
Les passagers des paquebots débarquent des canots à califourchon sur les épaules des indigènes.

Grue du Port d'Antsiranana


En 1891 une jetée est construite, ainsi que des magasins. Des engins de levage permettent le déchargement. Des voies ferrées relient les appareils de levage aux magasins . Les quais sont reliés à la ville militaire (sur le plateau) par une voie Decauville qui se prolonge sur 8 kms jusqu’au fort de Mahatsinjo.

En 1894 commencent les travaux d’éclairage :
  - Feu rouge du môle d’Antsirane
  - Phare du Cap Miné
  - Phare des Aigrettes
  - Phare du Cap d’Ambre allumé le 1er octobre 1900.

A la suite du décret du 4 octobre 1898 qui déclare Diego-Suarez « Point d’appui de la flotte », les travaux s’accélèrent. De nombreux travailleurs venus du Sud-Est affluent.


1901-1902 : Construction du mur du quai : établi par 3 m de fond sur 150 m de long.
Une cale de débarquement et 4 escaliers en pierre sont construits. Création d’un entrepôt des douanes et de magasins généraux. Réservoir de 100 m3 entre le parc à charbon de la Marine et le magasin général.

Mai 1901 : nouvel appontement en maçonnerie réservé aux transports militaires et doublant l’ouvrage voisin réservé aux passagers.

1905-1915 : construction d’un bassin de radoub de 206 m de long, 41 m de large et d’un tirant d’eau de 8 m.
  Une vaste darse pour torpilleurs est construite en face de l’arsenal.

1ère mise en eau du bassin de radoub

1932 : Construction d’un groupe de tanks à mazout

Inauguration du quai4 mai 1936 : Inauguration du quai d’accostage par le Gouverneur Général : 120 m de long sur 47 de large dont 17 m d’appontements. Profondeur : 8 m 50.

1939 : La Marine reprend les installations du bassin.

Mai 1942 : Attaque anglaise sur Diego Suarez : le croiseur Bougainville et le sous-marin Béveziers sont coulés ainsi que 2 bateaux italiens. L’aviso D’Entrecasteaux parvient à sortir du port mais sera coulé plus tard dans la baie des Cailloux Blancs.
Les portes du bassin de radoub sont sabordées par les français.

29 mai 1942 : Un sous-marin de poche japonais parvient à pénétrer dans la rade et à torpiller le cuirassé anglais Ramillies et le pétrolier British Loyalty.

1945 : Installation de la DCAN (Direction des Constructions et Armes Navales) qui bénéficie de nombreux matériels récupérés sur les Allemands.

Juillet/Août/Septembre 1973 : Départ des Troupes Françaises.

1975 : La DCAN devient la SECREN ( Société d’Exploitation, de Constructions et Réparations Navales)

2007 2011 : Réhabilitation et aménagement du port pour 15 M€.



■ J. Renou - Ingénieur résident pendant la réhabilitation du port
■ S. Reutt - Association Ambre