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Catégorie : Société
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Elibin Tokiniaina, magistrat au Tribunal Administratif d'Antsiranana et vice-président national du KMF/CNOE
Elibin Tokiniaina, magistrat au Tribunal Administratif d'Antsiranana et vice-président national du KMF/CNOE

Les citoyens ont pris l’habitude de penser que c’est la société civile qui assure l’application des Droits de l’Homme. Cependant, l’Etat est le garant de l’application des droits tandis que la société civile en est la gardienne. Elibin Tokiniaina, magistrat au Tribunal Administratif d'Antsiranana et vice-président national du KMF/CNOE (Comité Nationale d'Observation des Elections - Education des citoyens) donne plus d’explication sur le sujet

La Tribune de Diego : Comment reconnait-on un Etat qui défend les droits de ces citoyens ?
Elibin Tokiniaina :
Effectivement, il appartient à l'Etat de défendre les droits de ses citoyens. Ainsi, il est nécessaire que l'Etat lui-même ait la volonté de défendre ces Droits qui se concrétise par l'affirmation de ces droits dans des textes solennels notamment la Constitution, l' insertion dans l'ordre juridique interne des traités internationaux d'une part, et d'autre part, la mise en place de structures indépendantes destinées à constater les violations de ces Droits et de sanctionner le cas échéant.

En cas de violation des droits de l’Homme constatée par un citoyen que peut-il faire ? Est-il possible pour un simple citoyen de « s’attaquer » à une plus grande entité parce que celle-ci aurait bafoué les droits de l’homme ? Sinon quel est le recours que la loi met à sa disposition ?
E. Tokiniaina :
Comme je l’ai mentionné précédemment, des structures ont été créées à cet effet. Les citoyens disposent de moyens juridictionnels tels que les tribunaux judiciaires et administratifs. Il y a aussi les moyens non juridictionnels : "Le Médiateur, défenseur du peuple". Cette institution existe depuis longtemps à Madagascar, prévue par l'ordonnance n° 92-012 du 29 Avril 1992. Cette institution est destinée à défendre les citoyens face à l'hégémonie de l'Administration, toutefois, elle reste malheureusement méconnue par bon nombre de nos concitoyens. Pas plus tard qu’au mois de juin, l'Assemblée Nationale a voté la loi n° 2014-007 portant institution de la Commission Nationale Indépendante des Droits de l’Homme ou CNIDH. Cette Commission une fois sa mise en place effective, sera chargée, entre autres, de recevoir et d'examiner les plaintes et requêtes individuelles ou collectives en matière de violation des Droits de L'Homme. Il existe aussi des Sociétés Civiles qui sont de plus en plus nombreuses œuvrant dans ce domaine.

Souvent la société civile reproche à l’Etat de ne pas assurer son rôle de garant de l’application des droits de l’Homme, quelle est exactement le rôle de la société civile dans ce domaine ?
E. Tokiniaina :
En effet, la Société Civile tire souvent la sonnette d'alarme parce qu'elle joue le rôle d'interface entre l'Etat et les citoyens; elle rappelle à l'Etat ses engagements, dénonce les violations des Droits et assiste les victimes.

Quel moyen la société civile a-t-elle pour se faire entendre par l’Etat ? Comment se fait-il d’après vous qu’il y ait des associations et des ONGs qui sont plus efficaces que d’autres dès qu’il s’agit d’interpeller l’Etat ?
E. Tokiniaina :
Le plaidoyer et l'interpellation sont les principaux moyens dont dispose la Société Civile dans l'accomplissement de ses rôles. Plusieurs paramètres sont à prendre en compte, l’expérience, l’envergure ...Ce qui fait que des ONGs internationales telles qu'Amnesty International ou Reporters Sans Frontières sont mieux écoutées. Pour la Société Civile malgache, je crois qu'il est grand temps de former un « chœur », de ne pas agir en ordre dispersé afin de gagner plus de considération auprès de l'Etat; comme on dit toujours, l'union fait la force !

Faut-il toujours que la société civile l’interpelle pour qu’il y ait prise de responsabilité face à une violation des droits humains ? Sinon quelle institution au sein même de l’Etat a la compétence d’agir pour le respect des droits de l’homme ?
E. Tokiniaina :
Certes, le pouvoir public a parfois besoin d'être un peu "secoué". Toujours est-il que la Société Civile continuera de dénoncer, d'interpeller tant qu'il existe des cas de violation des Droit humains puisque tel est son rôle. Je suis optimiste quant à l'instauration de cette Commission Nationale Indépendante des Droits de l’Homme. Elle apportera un changement notable à Madagascar étant donné sa composition et ses attributions, elle jouera un rôle de balise aux dérives.

Comment la société civile parvient-elle à assurer que l’Etat accomplisse les décisions qu’il a prises en ratifiant les conventions internationales ?
E. Tokiniaina :
Il n’y a pas que la Société Civile, les médias ont aussi leur part de responsabilité et les citoyens, au préalable, doivent connaître leurs droits. Et s'agissant du respect des droit fondamentaux, la Communauté Internationale nous observe attentivement. Enfin, je pense qu'il n'est pas superflu de rappeler que droit et devoir vont nécessairement de pair. Ainsi, des devoirs incombent à chaque citoyen envers sa nation.

■ Recueillis par V.M