L’histoire de Monde est difficile à tracer… elle faisait partie d’un monde oublié de tous. Au fin fond de Betsiaka, elle se fait violée par une personne en laquelle elle avait confiance, elle souffre en silence pendant des semaines et se fait secourir tardivement
Monde a 12 ans et son enfance est difficile puisque son père décède quelques années seulement après la séparation avec la mère. Celle-ci étant incapable mentalement, selon les travailleurs sociaux d’Antsiranana, le père a emmené la fillette de deux ans avec lui. Celui-ci décède alors que Monde n’a que quatre ans. La garde de la petite fille a alors été confiée à une grand-tante. Celle-ci étant âgée, un oncle du défunt père de l’enfant s’est chargé de veiller sur elle et la petite.
Alors que la femme de cet oncle travaillait dans les champs, il s’introduisait au domicile de Monde et de sa grand-tante et violait à plusieurs reprises l’enfant, elle subissait aussi différents types de violences corporelles. Monde n’allait pas à l’école. Il a été rapporté qu’elle souffrait d’une déficience mentale qu’elle aurait héritée de sa mère et qu’elle était dans l’impossibilité de raconter ce qui lui était arrivée. Elle était malade depuis un mois lorsqu’une personne connaissant les membres de sa famille maternelle leur a rapporté l’état critique dans lequel se trouvait Monde. La famille maternelle a récupéré l’enfant dont le village se trouve à 8 kilomètres du leur. Le 24 septembre, une grand-tante et une sœur de sa mère, accompagnées de son grand-père décident de l’emmener au centre de santé de base de Betsiaka, district d’Ambilobe, qui se trouve à environ 23 kilomètres de leur village. Ils ont effectué le trajet à pied, Monde dans les bras. Au centre de santé, elle a reçu les premiers soins. Elle avait une grande bosse sur le front et a été opérée sur place. Le personnel médical a ensuite estimé qu’elle devait être évacuée à Antsiranana. Elle est arrivée au centre hospitalier universitaire de Tanambao le 27 septembre. Au bout de deux jours, elle a été transférée au service des urgences et avait besoin de sang. Il a fallu attendre une semaine pour que la transfusion puisse se faire. Des appels ont été lancés à Antsiranana et ses environs, mais sans donner de résultats. Les poches de sang AB+ ont finalement été envoyées depuis la Capitale par le ministère de la population. Si son état semblait s’améliorer après la transfusion, quelques jours plus tard, Monde s’était affaiblie. Elle a été transférée aux urgences du CHU Place Kabary et a subi encore une transfusion sanguine, mais le 11 octobre, n’ayant plus la force de lutter, elle est décédée.
Le prévenu attend son procès en prison
L’homme qui a violé Monde est âgé de 61 ans. Il a été arrêté le vendredi 12 octobre dans la ville d’Ambilobe. Il a quitté son village, mais le réseau de protection de l’enfant a suivi de près la situation et a procédé à des enquêtes pour le retrouver. La section des recherches criminelles de la gendarmerie d’Antsiranana a effectué l’arrestation. Le 13 octobre, le prévenu est placé en mandat de dépôt, dans l’attente de son procès, qui se tiendra dans moins de huit mois. D’après les informations, il s’agit d’un violeur récidiviste puisqu’il a déjà abusé d’une enfant dans son village. L’affaire a été conclue à l’amiable avec la famille de la victime. Pour le cas de Monde, l’individu a tenté de négocier avec la famille en proposant deux zébus pour effacer son crime, mais la communauté l’a ignoré. La famille maternelle de Monde a essayé de savoir plus sur les violences qu’elle avait subies, mais la petite étant fatiguée et très affaiblie, personne n’arrivait à saisir ce qu’elle disait. Avant son décès, les travailleurs sociaux indiquent qu’elle a prononcé à plusieurs reprises le nom du grand-oncle qui a avoué aux gendarmes comment il a violé l’enfant.
Mobilisation communautaire
Monde a pu être amené au centre de santé grâce à la mobilisation communautaire du village de sa mère. Femmes, hommes et enfants ont donné tout ce qu’ils ont pu pour sauver la vie de la fille. Au village de son père, elle a été malade pendant un mois, mais elle s’est battue toute seule. Aucune aide n’a été fournie lorsque la famille maternelle en a demandé lors de l’évacuation vers le centre de santé. Ce sont des habitants d’un village voisin qui sont venus à la rescousse. Le jour du décès, ce sont les agents de la direction régionale de la population de la DIANA et les agents de la gendarmerie qui ont trouvé un véhicule pour le transport du corps et des quelques membres de la famille présents, négocié le transport et aidé financièrement. Le directeur régional de la population a indiqué que les médecins ont fait ce qu’ils ont pu et le service qu’il dirige a contribué aux achats de médicaments.
Les histoires de viol, sur adultes ou sur des enfants se banalisent. Personne n’y prête attention que lorsque l’issue est des plus sordide. Bien que le viol ait toujours une issue dramatique. Ce qui est à l’heure actuelle est primordial, pour ce qui est du cas de Monde, est de s’assurer que justice soit faite et qu’elle ne soit pas oubliée, pour que d’autres victimes ne soient pas oubliés. A suivre.
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