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St Valentin : un couple à Diego Suarez
St Valentin : un couple à Diego Suarez

Ceux qui vivent ou même passent dans le Nord constatent que c'est la liberté dans la vie amoureuse qui caractérise la vie amoureuse à Antsiranana. Que ce soit dans le choix du partenaire que dans la décision de changer de compagne. Liberté que certains pourraient qualifier de frivolité ou d'inconstance de l'un et de l'autre sexe

Cela ne signifie pas que la vie de couple n’est jamais durable ou que les mariés se séparent facilement. La vie amoureuse des habitants de Diego Suareza toujours été influencée par les nombreuses cultures qu’ils ont côtoyées et adoptées. Le métissage n’est donc pas seulement racial ou physique, mais culturel aussi.
Pour connaître la place qu’occupe les traditions relatives à la vie amoureuse et au mariage au sein des sociétés sakalava et antakarana, les deux principales ethnies de cette partie de l’île. Nous avons posé quelques questions à un Raiamandreny, considéré comme étant le gardien de l’histoire et des traditions de l’extrême nord de Madagascar : M. Cassam Aly.  
M. Cassam Aly nous a expliqué que c’est par métissage qu’Antsiranana a été peuplé. L’installation des étrangers à Diego Suarez date de quelques années avant la colonisation, soit vers 1885. Plus de 100 hommes, des Créoles de la Réunion sont parmi les premiers arrivés, puis sont arrivés les Indiens, les Comoriens et les Mahorais. En 1900, comme les colons ne se sentaient pas en sécurité à cause de l’insurrection dans le Sambirano, le Maréchal Joffre emmena près de 9 000 hommes de troupes de toutes armées: Africains, Italiens, Grecs, Français, Chinois…  Ainsi la nouvelle ville avec l’arrivée des femmes: saint-marienne, mahoraises, antakarana, sakalava, betsimisaraka  se construit peu à peu.     A cause de cette attitude des femmes, les hommes boudaient la ville. Plus tard, ils offraient à leurs amoureuses, restées au village, le patry, un tissu indien que les femmes portent en cérémonie. D’où la fameuse « Diego tsara patry, Antsiragnana mila vôla » nous dit Cassam Aly en souriant. Pour pouvoir acheter de jolis patry, il faut aller à Antsiranana pour trouver de l’argent. Les hommes se rendaient en effet dans la ville pour travailler et ramener le patry.
Autrefois, nous raconte-t-il encore, les jeunes ne se mariaient pas parce qu’ils s’aimaient, il appartenait aux parents de trouver une femme à leur fils, l’amour ne vient qu’après des mois de vie commune. Les jeunes hommes se mariaient en moyenne à 20 ans tandis que les filles à 14- 15 ans. Les parents choisissaient leur future bru selon le clan et la famille dont elle est issue. Un mariage avec un ou une descendant(e)d’une personne coupable de méfait envers la société n’est pas possible. Il en était ainsi, pour des raisons historiques, du mariage entre Antankarana et Merina. Si les jeunes se mariaient quand même ; à leurs décès, ils n’étaient pas admis au tombeau familial. Du côté de la jeune fille, les parents s’assuraient que le jeune homme ne soit pas issu de « antsiadrano », dont les descendants auraient des difficultés à faire fortune et même à subvenir à leurs propres besoins. Ainsi on se méfiait quand une belle jeune femme n’a pas été demandée en mariage. Dans le cas où l’homme n’a pas les moyens financiers et les matériels pour fonder un foyer, il suit son épouse et vit avec sa belle-famille. On l’appelle alors jaloko.
A Madagascar, la loi reconnaît la légitimité du mariage coutumier. Ce n’est donc pas l’acte de mariage ou l’existence d’un livret de famille qui détermine la situation matrimoniale d’une personne. Dans la plupart des régions de la grande île, en milieu urbain ou rural, c’est pour se prévaloir de certains droits et pour les pièces administratives que les couples décident de faire un mariage civil.
Lors que les parents sont d’accord pour marier leurs enfants, le « fehim-panambadiana », le mariage traditionnel est organisé. Pour rendre honneur aux parents de la jeune fille, le jeune homme et sa famille leur offrent un bœuf (actuellement, de l’argent) comme dot. Les jeunes passent alors un an ensemble, c’est le mariage à l’essai ou le mahare par islamisation. Au bout de un an, la jeune femme peut quitter le foyer si elle n’est pas heureuse ou n’est pas satisfaite de son mari. Elle rentre chez ses parents, mais ne vit plus dans la même maison. On lui offre une nouvelle place, elle est libre et a le statut de « mitovo ». Cela signifie qu’elle peut recevoir l’homme qu’elle aime chez elle, sans offenser la société et sans mettre les parents au courant, au début. Au bout de six mois, comme ce qui se fait d’ailleurs jusqu’à aujourd’hui quand deux jeunes décident de vivre ensemble, le jeune homme avec sa famille demande la main de la jeune femme à ses parents. Le fehim-panambadiana a de nouveau lieu avec l’homme que la femme a choisi. Généralement, c’est ce deuxième lien qui dure.
C’est donc parmi ces femmes, dans ces années 1900, mécontentes de leurs unions imposés et qui n’ont pas trouvé l’amour auprès de leurs époux prédestinés qui sont parties de leurs villages et ont épousé les hommes de différentes nationalités venus travailler à Diego Suarez. D’où le nom de la ville : Antsiranana, indique M. Cassam Aly car quand les gens demandaient aux femmes « où allez-vous ? », elles répondaient « Andeha antsi (hi) ragnana », c’est-à-dire à la ville des différentes races.

Plus d’un siècle de contact avec les étrangers, qu’est devenue la tradition? Certes, certaines coutumes ne sont peut-être plus adaptées à cause du développement technologique et scientifique. Mais il faut bien admettre qu’il y a des mœurs et des coutumes relatives à la vie amoureuse qui servent de balise et de limite à certains comportements et modes de vie : prostitution, tourisme sexuel, abandon de famille, détournement  de mineurs, voire viol.

■ V.M.


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