Dans les rues de Diego Suarez, très peu de personnes portent des lunettes de vues malgré l'existence de nombreux vendeurs de lunettes de soleil ou de vue à bas prix. Enquête auprès des professionnels pour connaître les raisons de cette absence
Situation
À Diego Suarez, il existe un seul opticien. Or, de nombreuses lunettes sont vendues un peu partout dans les rues, sur le marché ou dans les magasins de la ville. Les malgaches dont le pouvoir d'achat est faible vont le plus souvent vers ces approvisionnements légaux qui restent très bon marché. Les professionnels de la vue nous on fait part de leur difficulté à s'aligner sur le prix de la paire de lunette à bas prix vendue 5 000 Ar contre 55 000 ou 60 000 Ar pour une bonne paire de lunette. « Je m'adresse, nous dit cet opticien, à une petite clientèle, autour de 5% des gens de Diego Suarez qui ont un pouvoir d'achat moyen. Cela permet à ces gens d'acquérir des lunettes de vue selon leurs mesures, leur écart oculaire, bref tout ce qu'il faut pour que ça corresponde à leur vue. Je ne monte seulement que 25 paires de lunettes par an pour des enfants de Diego Suarez. »
Quels sont les problèmes de ces paires de lunettes ?
Selon les professionnels, ces lunettes à bas prix entrainent souvent une fatigue à cause d'une vision non parfaite et non rectifiée. Pour le docteur ophtalmologue de Diego Suarez que nous avons interrogé, ces lunettes englobent le problème de céphalée (maux de tête) qui n'a aucune conséquence au niveau de la rétine. Le choix des lunettes se fait après un essayage rapide et approximatif dans la rue ou dans un magasin de la ville. « Ainsi la vision monoculaire n'est pas prise en compte selon notre opticien. Si les deux yeux ont une vision à peu près correcte, ils prennent la paire. Mais il se peut qu'un œil soit plus ou moins bien corrigé. Dans l'ensemble cela donne une vision plus ou moins parfaite. Les verres sont avec un écart pupillaire d'une autre personne, la hauteur du centre optique adapté à une autre personne. Voilà le problème qui peut se poser… ».
D'autre part, toujours selon ces professionnels de la vue, les habitants de Diego Suarez ne se rendent pas compte qu'ils ne voient pas de loin. Pour le travail, pour l'écriture, ils prennent souvent des « lunettes loupes » qui ne corrigent en rien la vision de loin. L'option des deux paires de « lunettes à l'ancienne » (une pour la vision de loin et l'autre pour la vision de prés) est la solution couramment adoptée.
La lunette :une « position sociale »
D'après notre ophtalmologue, il est intéressant de comprendre la perception qu'ont les malgaches vis à vis des lunettes. D'une manière générale, « les malgaches n'aiment pas que les enfants portent des lunettes. Ils ne consultent pas tant que l'enfant ne se plaint pas de maux de tête. Si l'on porte des lunettes, on est aveugle, on est malade. C'est une position sociale. Autrement dit, si un enfant porte des lunettes, c'est quelque chose de tragique. Ils pensent que les lunettes vont aggraver la maladie ».
C'est en ce sens qu'une sensibilisation a été entreprise en 1994 à Antananarivo pour sensibiliser la population sur les problèmes liés à la vue. « La plupart du temps, les enfants viennent me consulter pour des problèmes de conjonctivite, s'alarme ce docteur, mais pas pour des problèmes de baisse de vision. C'est un problème d'éducation… »
■ C.B.
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