Soumis aux coupures d’eau et d’électricité, disposant d’un personnel insuffisant pour assurer les soins et la garde des malades sans parler de l’entretien des locaux et du matériel vétuste, les employés de l’hôpital psychiatrique d’Antsiranana tirent la sonnette d’alarme sur leurs conditions de travail et évoquent le risque que de plus en plus de leurs patients soient renvoyés dans la rue, faute de moyens.
L’unique hôpital psychiatrique de la province d’Antsiranana (Régions DIANA et SAVA) est l’un des sept que compte le pays. Le personnel est composé de huit employés : un médecin chef, un médecin traitant, un major, quatre infirmiers et un agent d’appui. L’hôpital, qui est doté de vingt lits, a pris en charge pendant l’année 2012 195 patients, dont 59 femmes et 136 hommes.
A part quelques entretiens effectués avec la collaboration d’associations étrangères, selon le Major Raveloson Leka Bernard, il n’y a jamais eu de réhabilitation de l’hôpital. Ce qui est pourtant nécessaire au vu de l’état actuel des infrastructures et du materiel. « Etant en période de crise, l’Etat n’a pas de budget pour une réhabilitation des bâtiments », et ce sont les employés qui font de leur mieux pour nettoyer les alentours.
Traditionnellement, à l’hôpital psychiatrique, c’est la famille qui prend en charge le malade. Un membre doit assurer le rôle de garde-malade pour accompagner la personne dès qu’elle y est admise. L’ensemble des frais d’entretien et de traitement du patient est à la charge des familles. Selon le Major Raveloson Leka Bernard, certains patients sont abandonnés à l’hôpital. Des membres de la famille les accompagnent jusqu’à l’établissement où ils remplissent les formulaires, achètent les médicaments de la première vague de traitement, puis prennent la fuite... Fort heureusement, d’autres familles de bonne volonté font des dons ainsi que des religieuses ce qui permet tant bien que mal de compenser. C’est grâce à ces appuis que beaucoup de patients parviennent à suivre le traitement et ensuite rentrer chez eux. A défaut de dons, les médecins n’ont d’autres alternatives et doivent libérer les patients même s’ils ne sont pas guéris. Et l’on retrouve ces personnes divagant dans les rues de la ville. Les personnes originaires de la SAVA, depuis la chute du prix de la vanille, n’ont quant à eux plus les moyens de faire le déplacement jusqu’à Antsiranana et préfèrent s’accommoder tant bien que mal de la présence des malades chez eux.
Au manque de moyens et de personnel habituels s’ajoute maintenant la recrudescence des coupures d’eau et d’électricité dus aux difficultés que connait la JIRAMA qui ne semble pas reconnaitre à cet hôpital le statut d’établissement de soin, qui exige la disponibilité de son personnel à toutes heures du jour et de la nuit. Le caractère imprévisible et parfois violent de certains patients rend également nécessaire la présence d’un service de sécurité correctement formé et suffisamment nombreux, que les crédits alloués à l’hôpital ne permettent pas de financer.
Si de nombreux malades sont abandonnés par leurs familles, l’existence de cet hôpital est le seul appui sur lequel peuvent compter les familles pour qui les maladies mentales ne sont que des... maladies, qu’il convient de soigner avec un traitement adapté et avec l’aide de spécialistes. « Je ne peux pas laisser mon mari mourir à petit feu » nous confie une mère de famille lors de notre passage à l’hôpital parce qu’elle considère que « devenir fou » c’est « mourir à petit feu ». « Je ne laisserai jamais mon fils s’autodétruire dans la drogue, car il a encore l’avenir devant lui » affirme une autre mère de famille pleine d’espoir pour la guérison de son fils âgé de 21 ans, victime de la drogue.